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Avalanches statistiques et conduite à tenir

par Cédric Larcher dans Technique 28 févr. 2011 mis à jour 27 janv. 2014 8230 lecteurs Soyez le premier à commenter
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Une course contre la montre

En s’appuyant sur des données sur les accidents en avalanches collectées par l’ANENA (Association Nationale pour l’Etude de la Neige et des Avalanches), Cédric  Larcher rappelle ici l’importance de la temporalité et la méthodologie dans la course contre la montre qui débute lorsqu’un ou plusieurs de ses camarades se trouvent emportés par une avalanche.
Outre – évidemment – des connaissances sur les facteurs de déclenchement des avalanches ET une maîtrise et un bon usage de matériel approprié, il est toujours bon d’avoir en tête ces quelques données.

Texte : Cédric Larcher
Photos : Coll. Fundation Preventura
Collaborateur ANENA, www.anena.org
Gérant kairn.com, www.kairn.com

 

 

horloge AVALANCHE !!!

Avalanche : une course contre la montre

Une avalanche de plaque vient de se déclencher et emporte un skieur. En quelques secondes tout se met en mouvement et glisse le long de la pente.
L’avalanche termine sur un replat, l’aérosol se dissipe, la course commence.

Grandes plaques sur la face nord de Costa Rouenda (Hautes-Alpes), photo : Carnets d'Aventures Grandes plaques sur la face nord de Costa Rouenda (Hautes-Alpes), photo : Carnets d'Aventures
Grandes plaques sur la face nord de Costa Rouenda (Hautes-Alpes), photo : Carnets d'Aventures

TOUT SE JOUE EN 15 MINUTES

T = 0 mn

70% des victimes d’avalanche ne sont pas ensevelies. 3% d’entre elles meurent de polytraumatismes. 30% des victimes sont ensevelies. 93% d’entre elles sont encore vivantes lorsque l’avalanche s’arrête. C’est alors que le chronomètre entre en action.
 
Tic-tac, tic-tac…
Où est-il ? Tu le vois ? C’est qui ? C’est la seule victime ? Que faisons-nous ? Par où allons-nous sur place ? Comment ? Ca risque de tomber encore ?
Tout le monde met SON ARVA EN RECEPTION ! La recherche commence.
Pour qu’un groupe prenne conscience de ce qui se passe, s’organise et commence à chercher, il n’est pas rare que 5 minutes soient nécessaires.

Recherche DVA
Recherche DVA

Sondage en ligne, La Hoya 2008 (T.Natiello/Aventura Segura)
Sondage en ligne, La Hoya 2008 (T.Natiello/Aventura Segura)

T = 5 mn

Tic-tac, tic-tac…
La recherche primaire (recherche d’un premier signal), la recherche secondaire et finale (afin de localiser la victime) ainsi que le sondage doivent se faire en un minimum de temps. Si cette phase n’excède pas 5 minutes, la victime passera déjà 10 mn ensevelie. Le souci c’est qu’il ne suffit pas de toucher la victime à la sonde, il faut encore creuser pour l’atteindre.

T < 15 mn

1- Phase de survie
De 0 a 15 minutes.
Les chances de survie sont de 91%, le risque d’une issue fatale est faible

Source : La courbe de survie de Herman Brugger et Marcus Falk (1989)*

Tic-tac, tic-tac…

La neige d’un dépôt d’avalanche se tasse rapidement. Il n’est pas rare de mettre une heure pour faire un trou d’un mètre de profondeur. À condition bien sûr de disposer de pelles et pas uniquement de skis, raquettes ou snowboards.
Pendant ce temps le chronomètre poursuit sa course, nous sommes à 15 minutes.

Tic-tac, Tic-Tac…

2 : La phase d’asphyxie.
De 15 à 35 minutes.
C’est durant cette phase que le risque de mourir par asphyxie est le plus important, tenant compte du fait qu’il est impossible de survivre sans un volume d’air suffisant ou avec le thorax comprimé.

Sans ARVA, il est quasiment impossible de trouver la victime ensevelie. Il convient de regarder si aucun indice ne pointe à la surface du dépôt et de marquer le point où la victime a été vue pour la dernière fois. Tenter un sondage avec les bâtons de skis ou les skis est la seule option envisageable en attendant l’arrivée des secours.

Grâce à la généralisation de l’utilisation du téléphone portable, à la couverture importante des massifs montagneux français et à l’utilisation quasi systématique de l’hélicoptère, les secours organisés peuvent désormais intervenir très rapidement et offrir de réelles chances de survie à la victime. L’utilisation du système Recco permet également de localiser très rapidement la/les victimes à défaut ou en complément du système ARVA.

En l’absence d’ARVA ou de détecteur Recco, il faudra attendre l’arrivée d’une équipe cynophile ou de nombreux secouristes afin de procéder à des sondages en ligne.

Sondage en ligne, La Hoya 2008 (T.Natiello/Aventura Segura)
Sondage en ligne, La Hoya 2008 (T.Natiello/Aventura Segura)

Tic-tac, tic-tac…

3 : Phase latente
De 35 minutes jusqu’au secours
Certaines victimes parviennent à survivre jusqu’à cette phase à condition de disposer d’un volume d’air suffisant.
Elles se retrouvent alors dans une « phase de sécurité relative » qui leur permet de survivre quelque temps avant de devoir affronter les problèmes liés à l’hypothermie.

Après 120 minutes, Il n’existe que 7% de probabilité de rencontrer la victime vivante.

4: La phase de secours
Du secours à l’arrivée à l’hôpital.
Le risque d’une issue tragique est de nouveau important du fait des risques liés au secours (hypothermie rapide ou risques liés à la manipulation d’une victime atteinte à la colonne vertébrale ; il existe également un risque de relâchement psychologique de la victime à la vue des secours pouvant entraîner la mort).

Il est primordial d’accéder rapidement aux voies respiratoires et au thorax de la victime et ensuite de l’extraire tout en tenant compte de la forte probabilité de lésion vertébrale.

Les secours organisés

Si donner l’alerte alors que l’on dispose d’ARVA pouvait être considéré comme secondaire par le passé, les données ont considérablement changé ces dernières années.
Selon les statistiques de l’Association Nationale pour l’Etude de la Neige et des Avalanches, la généralisation de l’utilisation du téléphone portable, la couverture quasiment intégrale des massifs français et le recours quasi systématique à l’hélicoptère permet dans 94% des cas aux secours d’arriver sur les lieux de l’accident en moins de 35 minutes.

Leur présence peut s’avérer cruciale pour :

Localiser la victime : Avec le stress, le manque d’entraînement, ou en cas de multivictimes, la situation peut générer une perte de temps importante. Sachant que les secours organisés disposent d’outils spécifiques (Recco, chiens), leur efficacité fait qu’il nous faut considérer le fait de faire appel à eux au plus vite et de disposer de réflecteurs Recco en complément des ARVAS.

Accéder à la victime : Il ne suffit pas de détecter la victime. Encore faut-il pelleter pour y accéder. Si la victime est enfouie profondément, les délais pour y accéder peuvent s’allonger drastiquement. La présence de personnel entraîné et équipé sera de nouveau cruciale.

Les premiers secours : L’intervention des secours professionnels, formés et entraînés à ces manœuvres et disposant de matériel spécifique peut encore une fois être un élément déterminant de la survie de la victime.

Notes :

  • ARVA (Appareil de Recherche de Victimes d'Avalanche)
    = DVA (Détecteur de Victimes d'Avalanches) : émetteur/récepteur individuel pour la détection des victimes d’avalanche
  • Recco : le système Recco comporte 2 parties : un réflecteur électronique passif (transpondeur) porté par le skieur (parfois intégré directement dans certains vêtements ou équipements de montagne/free ride), et un détecteur utilisé par les secours organisés. Contrairement à l’ARVA qui peut émettre ET recevoir (un skieur enseveli peut donc être localisé par ses camarades), les possesseurs de détecteur Recco sont les secours organisés.

avalanches_01_hr.jpg Récepteur Recco
Récepteur Recco

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