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Asie Centrale guide pratique

par Johanna dans Dans le monde 02 sept. 2020 987 lecteurs Soyez le premier à commenter
Lecture 7 min.

Voyager en Asie Centrale

À travers les steppes, déserts et montagnes sauvages d’Eurasie

 

En complément du dossier Asie centrale et Caucase de Carnets d'Aventures 61 (comportant des récits de jolis voyages), voici nombre d'informations pratiques sur les divers pays de ces vastes territoires.
Texte : Sébastien Langlais, Carnets d'Aventures

Voir aussi les fiches pays par pays :


Asie centrale : guide pratique

De l’Asie centrale, l’imaginaire populaire retient les immenses steppes peuplées de bergers nomades, ou les hauts sommets enneigés du Pamir ou des Tian Shan, les Montagnes célestes. Mais ce territoire à la géographie complexe est bien plus que cela. On y rencontre également de vastes déserts (comme le Karakoum) ou de riches plaines agricoles (comme le Ferghana), dont l’irrigation déraisonnée est à l’origine de l’assèchement de la mer d’Aral.

Steppes kirghizes, photo : Jean-Christophe Rappo
Steppes kirghizes, photo : Jean-Christophe Rappo

Depuis longtemps, territoire d’échanges culturels et carrefour commercial, situé au cœur du faisceau de routes de la soie, l’Asie centrale – zone presque aussi étendue que l’Europe – possède des limites floues qui ont évolué au gré de l’histoire. Même si elle correspond généralement à une zone centrée sur l’ancien Turkestan – entre la mer Caspienne (ex-URSS) et le désert de Gobi (Chine) –, nous avons retenu d’intégrer également, pour ce dossier, des territoires aux marges de cet ensemble. Cette zone élargie s’étend ainsi des confins de l’Asie Mineure jusqu’au lac Baïkal, c’est-à-dire entre le Caucase (et notamment l’Arménie et la Géorgie) et la Sibérie méridionale (Russie), en passant par de nombreux pays en « stan » (joli pléonasme puisque ce nom signifie « pays », en persan), puis le Xinjiang (Chine) et la Mongolie. Aux pays Ouzbékistan, Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, l'UNESCO élargit « l’Asie centrale » aux pays suivants (en intégralité ou partiellement) : Afghanistan, Chine, Mongolie, Iran, Pakistan, Inde, Russie.
En plus de l’héritage soviétique de certains pays, cet espace est marqué par une relative unité culturelle turco-mongole, autour de la pratique des langues turciques d’Asie centrale (à l’origine du turc moderne), même si la culture persane y a également imprimé son empreinte, essentiellement dans les villes-oasis méridionales, comme Samarcande.

Kirghizstan.
Photo : Seb Langlais
Kirghizstan.
Photo : Seb Langlais
Mongolie.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Mongolie.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Samarcande, Iran.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Samarcande, Iran.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer

Asie centrale : frontières et visas

Les frontières parfois étonnantes de certains pays d’Asie centrale, ciselées comme de la dentelle, sont héritées de rapports de force complexes entre les différentes puissances régionales. La plaine du Ferghana résume à elle seule l’essentiel des difficultés géopolitiques de l’Asie centrale. Actuellement, trois pays de l’ex-URSS se disputent cette plaine fertile, avec un pré-découpage territorial (quelquefois sous forme d’enclaves) pensé par Staline, en appliquant la maxime « diviser pour mieux régner ». Cette région est devenue une véritable poudrière, terreau d’un islamisme radical.
Le Wakhan forme, quant à lui, une excroissance de l’Afghanistan, sous forme de « queue de poêle ». Cet artefact a été imposé par la Communauté internationale, au début du XXe siècle pour éloigner les deux géants coloniaux du continent : les Russes et les Britanniques (via l’Empire des Indes). Ici, la phrase de Sylvain Tesson prend tout son sens : « Il y a des vallées […] que la Géographie semble avoir prédisposées à l’Histoire. »

Kirghizstan.
Photo : Seb Langlais
Kirghizstan.
Photo : Seb Langlais

Asie centrale : faune et flore

Le chameau de Bactriane (à deux bosses) est un peu l’image d’Épinal de l’Asie centrale. Cet animal de bât est très adapté aux steppes semi-désertiques aux hivers rigoureux. L’été, il n’est pas rare de le rencontrer dans les montagnes et plateaux d’altitude. L’argali ou mouflon de Marco-Polo est l’animal sauvage emblématique des montagnes d’Asie centrale. Ses cornes spiralées en font malheureusement un trophée de chasse très convoité. Le cheval fait bien entendu lui aussi partie du paysage et de la culture d’Asie centrale ; le yack et le mouton sont aussi très représentés. Dans les montagnes, on retrouve également des espèces communes de nos montagnes européennes, comme le gypaète barbu ou l’edelweiss.

Tadjikistan / Afghanistan. Caravane de chameaux de Bactriane.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Tadjikistan / Afghanistan. Caravane de chameaux de Bactriane.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer

Asie centrale : itinérances sans moteur et mobilité douce

Ces vastes territoires sauvages et incroyablement diversifiés offrent de fantastiques terrains de jeu aux voyageurs nature de toute sorte ! Rappelons aussi aux adeptes de mobilité douce, et à ceux qui souhaitent le devenir :-), que toute l’Eurasie est accessible en transports de surface : bus, possibilité de faire de l’autostop et nombreuses lignes ferroviaires, dont les mythiques trains Transsibérien, Transmongolien, Transmandchourien, et la grande ligne Baïkal-Amour.

Lire les récits de voyage sans moteur dans Carnets d'Aventures 61.

Asie centrale à vélo

Avec la traversée de l’Amérique du Sud (cf. CA 58), la route de la soie constitue l’autre itinéraire transcontinental « classique » à vélo. Pour les cyclo-voyageurs, les hauts plateaux du Pamir (Tadjikistan) sont à l’Asie centrale ce que le désert du Sud Lipez (Bolivie) est à l’Amérique Latine (altitude et engagement comparables), un graal aujourd’hui relativement fréquenté.
Depuis 5-6 ans, grâce à une relative stabilité politique, le Tadjikistan et le Kirghizstan sont devenus les pays parmi les plus fréquentés par les voyageurs à vélo au long cours.

Asie centrale à cheval et à pied

Comme évoqué plus haut, le cheval fait partie de la culture de nombre de pays de cette région du monde. Voyager avec des chevaux est donc non seulement une belle manière de découvrir ces grands espaces, mais aussi un moyen de se rapprocher des habitants.

Asie centrale : trekking, alpinisme et ski d’itinérance

Pendant des années, les hautes montagnes de l’URSS (Caucase, Pamir, Tian Shan, et Altaï) ont formé un rude terrain d’aventure pour les alpinistes soviétiques. Habitués aux conditions extrêmes, les Russes sont aujourd’hui parmi les meilleurs himalayistes de la planète. Le trophée « Snow leopard », récompensant les alpinistes gravissant 5 sommets de plus de 7000 m d’altitude d’Asie centrale, est encore un défi recherché, en particulier en guise de préparation à l’ascension des plus hauts sommets himalayens. Parmi ces 5 montagnes, le pic Lénine est considéré comme l’un des sommets de plus de 7000 m le plus accessible de la planète.
Avec la Scandinavie, l’Altaï, est considéré comme le berceau historique du ski. On y a retrouvé des traces de cette pratique remontant à près de 5000 ans. Cependant, de nos jours, les stations de ski sont rares dans le cœur de l’Asie centrale ; le Caucase rassemblant les rares stations « modernes ». Le potentiel pour les itinérances à ski de randonnée est énorme. Par contre, l’absence de refuge rend les raids à ski particulièrement aventureux et engagés. Quelques massifs se prêtent à des sorties à la journée, comme dans le Caucase (Géorgie, Russie et Arménie notamment), dans les Pamirs (monts Fann, Tadjikistan) ou encore dans les Tian Shan (Kirghizstan et Kazakhstan, en particulier). Quelques hauts volcans isolés peuvent également être skiés – mais la neige y est rarement de bonne qualité à cause du vent –, comme le Damavand (5610 m) en Iran, où l’Ararat (5137 m) dans l’est de la Turquie. Les expéditions à ski au printemps, au sein des massifs plus isolés, sont plus rares et nécessitent souvent de tirer des pulkas afin d’être autonomes. Notons par ailleurs qu’en Sibérie méridionale, le ski de poudreuse est de plus en plus recherché en début de saison (décembre). Enfin, dans le Xinjiang (Chine), le Muztagh Ata (7546 m) est un très haut sommet assez peu technique, pour lequel le ski s’est imposé comme étant le moyen le plus adapté pour mener à bien les expéditions pour le gravir, y compris au cœur de l’été.

Asie centrale : sur l’eau

Les milliers de kilomètres de fleuves, rivières, lacs et mers (intérieures ou non) permettent au voyageur en kayak, packraft, paddle ou autre embarcation de visiter ces vastes territoires au fil de l’eau.

Mongolie à vélo.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Mongolie à vélo.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Packraft en Sibérie, ici le fleuve Ienisseï
Photo Hugues Le Tennier
Packraft en Sibérie, ici le fleuve Ienisseï
Photo Hugues Le Tennier
Ski en Géorgie.
Photo Romain Auclair
Ski en Géorgie.
Photo Romain Auclair

Risques

Les risques d’accident routier sont importants dans les pays d’Asie centrale, à la fois en lien avec La conduite (souvent rendue hasardeuse par l’absorption de vodka) et la vétusté des véhicules. Les risques sanitaires sont également présents et, avant le départ, on ne manquera pas de vérifier la validité de son carnet de vaccination.
Compte tenu de l’absence d’infrastructures adaptées, le risque de séisme est très fort notamment entre la Turquie, l’Arménie et l’Iran. Notons également que les ex-républiques soviétiques ont souvent servi de lieux de stockage de matériaux radioactifs de l’URSS. Avant tout voyage, il est important de bien se renseigner sur la localisation des zones contaminées. Enfin, dans ces zones pastorales où peuvent régner les loups (voire les ours), les chiens sont présents en nombre. Ils peuvent être imposants (comme les kangals en Turquie ou autres bergers du Caucase) et ne sont pas sans rappeler nos patous.
La petite délinquance existe également dans les grandes villes, comme en Europe. Au Tadjikistan, alors même que 2018 avait été décrétée « année du tourisme » pour contribuer à son attractivité internationale, le pays a été meurtri par un abject attentat (4 morts) envers des voyageurs à vélo. À l’instar du Caucase, le cœur de l’Asie centrale est situé à proximité de foyers islamistes nécessitant une vigilance et des comportements adaptés lors de séjours dans ces régions.

Parapente en Géorgie
Photo Romain Auclair
Parapente en Géorgie
Photo Romain Auclair

Quelques livres coup de cœur sur l’Asie centrale

(Petite sélection ouvertement subjective parmi la riche bibliographie sur l’Asie centrale, et marginalement de l’Iran avec Maalouf).

  • Djamilia, de Tchinguiz Aïtmatov. Rééd. Gallimard-Folio (2003).
  • Au détour du Caucase - Conversation avec un cheval, de Clara Arnaud. Éd. Gaïa.
  • Asie Centrale : vision d’un familier des steppes, de René Cagnat. Éd. Transboréal.
  • La vertu des steppes - Petite révérence à la vie nomade, et Ivre de steppes, Un hiver en Mongolie, de Marc Alaux. Éd. Transboréal.
  • Samarcande, d’Amin Maalouf. Éd. Lattès et Livre de poche.
  • Des monts célestes aux sables rouges, d’Ella Maillart. Rééd. Payot (2017).
  • Longue marche, de Bernard Ollivier, à pied de la Méditerranée jusqu'en Chine par la route de la soie en 4 tomes. Éd. Phébus.
  • Pamir : Oubliés sur le toit du monde, de Matthieu Mareile Paley. Éd. La Martinière.
  • La Chevauchée des steppes : 3000 km à cheval à travers l'Asie centrale, de Priscilla Telmon et Sylvain Tesson. Rééd. Pocket.
  • Dans les pas du fils, de Renaud et Tom François. Éd. Kéro et rééd. Pocket.
  • Caravanistan.com : Un site internet incontournable (avec forum de discussion) pour qui désire s’enquérir d’informations pratiques actualisées sur les différents pays d’Asie centrale.
Iran, désert de Lut.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
Iran, désert de Lut.
Photo : Alba Moreno Gañan et Thomas Millischer
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